Le 8 avril dernier, un rapport intitulé « IA : notre ambition pour la France » a été remis au Gouvernement. Fruit du travail d’une commission de 17 experts, ce document de plus de 130 pages dresse un état des lieux de l’intelligence artificielle. Il formule 25 recommandations pour faire de la France un leader dans ce domaine.
L’IA n’est pas une nouveauté, elle existe depuis les années 1950. Mais ces dernières années, notamment avec l’essor de l’IA générative, elle connaît un développement spectaculaire. Déjà omniprésente dans notre société, elle va prendre une place croissante dans notre vie quotidienne et ainsi transformer profondément notre économie et notre façon de travailler.
Des recommandations qui touchent plusieurs pans de la société
Le rapport se veut rassurant quant au fait que l’IA ne remplacera pas l’humain mais qu’il est essentiel d’être un acteur de cette révolution. « L’IA ne doit susciter ni excès de pessimisme, ni excès d’optimisme. Nous n’anticipons ni chômage de masse, ni accélération automatique de la croissance ». Face à ce constat, le rapport préconise un plan d’action articulé autour de trois axes principaux :
• Humanisme : mettre l’IA au service des citoyens dans des domaines clés comme l’éducation, la santé ou les services publics.
• Souveraineté : bâtir une IA française et européenne capable de rivaliser avec les géants américains et chinois.
• Responsabilité : maîtriser les risques et les impacts de l’intelligence artificielle sur notre société, notre démocratie et nos libertés individuelles.
L'IA au service des citoyens : éducation, santé, services publics
🔃 Améliorer notre système de santé
Le document évoque notamment la possibilité pour les médecins de consacrer plus de temps au soin grâce à l’automatisation des tâches administratives. L’IA pourrait aussi aider au diagnostic précoce de certaines maladies et permettre un suivi personnalisé des patients. Les progrès dans la vision par ordinateur ont déjà permis des progrès dans la robotique chirurgicale et dans l’analyse de radiographies.
👩🏫 Former massivement et en continu
Les exigences actuelles et futures de l’intelligence artificielle nécessitent un programme de formation étendu. Couvrant tous les âges et tous les domaines de la vie. Plus spécifiquement, les défis de la formation englobent trois objectifs distincts :
- Former des individus aptes à concevoir et à développer des solutions en IA.
- Former des professionnels compétents pour mettre en œuvre ces solutions au sein de leurs organisations.
- Sensibiliser de manière générale la population aux concepts fondamentaux et au fonctionnement de l’intelligence artificielle.
🔥 Transformer l'administration publique
Le rapport préconise ainsi « d’équiper les agents publics » en déployant des outils d’Intelligence artificielle dans les différents services de l’État et des collectivités. Cela pourrait par exemple permettre de réduire les délais de traitement des dossiers ou de mieux détecter les fraudes.
Bâtir une IA souveraine et compétitive
Pour que la France puisse déployer une IA au service de ses citoyens, elle doit disposer d’une véritable souveraineté dans ce domaine. Or, le document pointe un « net retard » de notre pays et de l’Europe par rapport aux États-Unis et à la Chine, qui dominent aujourd’hui le secteur. Pour rattraper ce retard, le document formule plusieurs recommandations :
- Investir massivement dans la recherche, l’innovation et les infrastructures nécessaires au développement de l’IA. La commission estime un investissement de 5 à 8 milliards d’euros supplémentaires par an. Soit le triple des sommes actuellement engagées.
- Disposer de « capacités de calcul souveraines », c’est-à-dire d’infrastructures informatiques de pointe sur notre sol.
- L’accès à des données de qualité, indispensables pour entraîner les algorithmes d’Intelligence artificielle.
- Attirer et retenir les meilleurs talents. La commission considère que parmi les trois à cinq mille profils internationaux très qualifiés susceptibles d’avoir un impact significatif sur la croissance de l’écosystème de l’IA, la France doit en attirer entre 10 et 15 %.
- Déployer l’IA dans notre économie, de l’industrie aux services en passant par l’agriculture.
Maîtriser les risques et les impacts de l'IA
Si l’IA offre des opportunités immenses, elle soulève aussi des défis et des risques qu’il convient de maîtriser. Le rapport insiste sur la nécessité d’une approche « responsable » lors de son développement, respectueuse de nos valeurs et de nos libertés fondamentales.
- Premier défi : bâtir une gouvernance internationale de l’IA, qui fait aujourd’hui défaut. Le document plaide pour l’adoption de règles et de standards communs au niveau mondial. La France et l’Europe doivent jouer un rôle moteur dans la définition de ces normes, en promouvant une approche humaniste de l’IA.
- Deuxième enjeu : se doter d’une capacité d’évaluation et d’audit des systèmes d’IA. Il s’agit de pouvoir tester et certifier les algorithmes, afin de s’assurer qu’ils sont fiables, robustes et non biaisés. Le rapport préconise la création d’une agence nationale d’évaluation de l’IA. Sur le modèle de l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité du Médicament) pour les médicaments, ainsi que le développement d’outils de « contrôle continu » des IA en cours d’usage.
- Troisième risque à prévenir : l’émergence de positions dominantes et de monopoles dans le secteur de l’IA. Le rapport alerte sur la concentration du marché autour de quelques acteurs, principalement américains et chinois, qui pourraient imposer leurs standards et capter l’essentiel de la valeur. Pour y remédier, il propose de renforcer les règles de concurrence et d’introduire des mécanismes de partage des données et des algorithmes.
En conlusion ?
Au terme de cette analyse, il apparaît clairement que l’intelligence artificielle constitue à la fois un immense défi et une formidable opportunité pour notre pays. Défi technologique, avec la nécessité de rattraper notre retard et de bâtir une IA souveraine et compétitive. Défi économique, avec l’enjeu de déployer massivement l’IA dans tous les secteurs pour stimuler l’innovation et la croissance. Défi sociétal enfin, avec l’impératif de maîtriser les risques et les impacts de l’IA sur notre vie quotidienne, notre travail, notre démocratie. L’impact financier sur les 5 prochaines années est estimé à 27 milliards d’euros selon la commission pour atteindre ces objectifs.